La filière biométhane continue d’évoluer, portée par de nouveaux cadres réglementaires. Après la création des Certificats de Production de Biogaz (CPB) et la montée en puissance des contrats de gré à gré, un nouvel arrêté vient franchir une étape importante : celui du 3 septembre 2025, qui établit pour la première fois les modalités de contrôle des installations de production de biométhane injecté.
Ces contrôles s’appliqueront aux sites bénéficiant d’un soutien public (obligation d’achat, appels d’offres) comme à ceux qui valorisent leur production via les CPB. L’enjeu : s’assurer que les installations respectent bien les conditions techniques et réglementaires, et donner plus de fiabilité à la fois aux soutiens publics et aux certificats délivrés.
De quoi s’agit-il ?
Le principe d’attestation de conformité et de contrôles périodiques n’est pas nouveau. Il avait été introduit dès 2021 dans le Code de l’énergie, mais sans modalités pratiques. En 2023, l’obligation a été confirmée dans les contrats d’achat de biométhane. Restait à définir comment ces contrôles seraient réalisés, leur contenu et leur calendrier.
C’est précisément ce qu’apporte l’arrêté du 3 septembre 2025 : il met en place, pour la première fois, un cadre opérationnel et applicable à toutes les installations de biométhane injecté.

Depuis 2021, le principe de contrôle et d’attestation de conformité a progressivement pris forme. L’arrêté du 3 septembre 2025 marque le passage à une application concrète, avec une mise en œuvre prévue en mars 2026.
Qui est concerné et à partir de quand ?
L’arrêté du 3 septembre 2025 couvre l’ensemble des installations qui injectent du biométhane dans un réseau de gaz naturel. Deux grands cas sont visés :
- celles qui bénéficient d’un contrat d’achat (guichet ou appels d’offres) ou celles issues d’un appel à projets ou d’une procédure concurrentielle.
- et celles qui valorisent leur production grâce aux Certificats de Production de Biogaz (CPB).
L’entrée en vigueur se fait en deux étapes :
- 8 Septembre 2025 : agrément des organismes de contrôle (articles 7 et 8)
- 7 Mars 2026 : application des prescriptions de contrôle (contenu, périodicité, justificatifs).
La règle générale est un contrôle tous les quatre ans. Pour les installations en obligation d’achat, un contrôle supplémentaire est prévu avant la fin du contrat.
Côté CPB, le rapport de contrôle périodique ou une attestation de conformité récente servira de justificatif lors des demandes annuelles.
Que vérifient les contrôles ?
Le contrôle couvre à la fois des aspects techniques, réglementaires et financiers. Les organismes agréés devront s’appuyer sur un référentiel publié par le ministère de l’Énergie.
Concrètement, plusieurs points sont passés en revue :
- Description de l’installation : localisation, conformité des équipements et cohérence avec la capacité déclarée.
- Comptage : exactitude des compteurs de biométhane injecté, de biogaz autoconsommé et de l’énergie fossile éventuellement utilisée.
- Exploitation : volumes produits, intrants, besoins énergétiques et indicateurs d’efficacité énergétique.
- Éléments juridiques et financiers : respect des conditions d’éligibilité au soutien, cumul d’aides, primes éventuelles.
- Stockages : vérification que les stockages rattachés à l’installation ne peuvent pas être alimentés par du gaz extérieur au site (notamment le réseau).
Ce cadre vise à garantir que la production déclarée correspond bien à la réalité de l’installation, et que les soutiens publics ou les certificats CPB reposent sur des données fiables.
Zoom sur le Comptage:
Lorsque l’installation utilise de l’énergie fossile pour ses besoins propres (par exemple pour chauffer le digesteur), un comptage séparé doit être mis en place. Dans les contrats d’achat signés depuis 2023, cette pratique est d’ailleurs interdite en dehors des phases de démarrage ou de redémarrage. Pour les contrats CPB, aucune interdiction n’est prévue à ce stade, mais le contrôle permet de tracer et de vérifier toute utilisation éventuelle.
Quand auront lieu les contrôles ?
L’arrêté prévoit plusieurs cas de figure selon la date de mise en service et la présence d’une attestation de conformité (AC).
- Installations mises en service avant le 1er octobre 2021
À cette date, le principe d’attestation de conformité n’existait pas encore (il a été créé par le décret n° 2021-1273 du 30 septembre 2021). Ces installations n’ont donc pas d’AC initiale.
Leur premier contrôle doit intervenir à la première échéance multiple de 4 ans après le 7 mars 2026 (date d’entrée en vigueur du nouvel arrêté).
Exemple : mise en service en 2018 → contrôle en 2026 ; mise en service en 2019 → contrôle en 2027
- Installations mises en service entre le 1er octobre 2021 et le 7 mars 2026
Le principe d’AC existait, mais le dispositif de contrôle n’était pas encore en vigueur.
Leur premier contrôle devra avoir lieu au plus tard à la première date anniversaire suivant le 7 mars 2026. - Installations mises en service après le 7 mars 2026
Ces installations seront directement soumises au nouveau cadre.
L’attestation de conformité (AC) initiale est délivrée au moment de la mise en service, par un organisme de contrôle agréé. Leur premier contrôle périodique devra intervenir quatre ans après cette AC initiale , puis être renouvelé tous les 4 ans.
Règles complémentaires
- Installations bénéficiant d’un contrat d’achat (OA)
Pour sécuriser la fin des contrats subventionnés, un contrôle spécifique est prévu entre 1 et 12 mois avant la fin du contrat. - Installations valorisant via les CPB
Pour ces unités, le rapport de contrôle périodique (ou une AC de moins de 4 ans) sert directement de justificatif dans les demandes annuelles de certificats.
Cas spécifiques de contrôle
L’arrêté prévoit plusieurs situations spécifiques, avec des modalités de contrôle adaptées :
- Modification de l’installation : lorsqu’une modification concerne la capacité de production, les conditions d’éligibilité au soutien ou le système de comptage, une nouvelle attestation de conformité doit être délivrée. Si le contrôle effectué est complet, il peut en même temps valoir contrôle périodique.
- Remplacement d’un compteur à l’identique : le contrôle est limité à la vérification du dispositif de comptage concerné. Il ne se substitue pas au contrôle périodique qui reste obligatoire tous les quatre ans.
- Variation de capacité limitée : lorsqu’une augmentation ou une baisse de production ne dépasse pas ±15 % sans changement matériel, un contrôle administratif « à distance » peut suffire. Ce contrôle allégé ne remplace pas non plus le contrôle périodique complet.
Qui peut réaliser les contrôles ?
L’arrêté du 3 septembre 2025 définit aussi les conditions d’agrément des organismes chargés de réaliser les contrôles. Ces dispositions sont entrées en vigueur dès le lendemain de la publication au Journal officiel.
Pour être agréé, un organisme doit notamment :
- être accrédité selon la norme ISO/CEI 17020 (inspection), avec un statut d’indépendance de type A
- disposer de compétences en audits énergétiques (NF EN 16247-1 et 3),
- démontrer son impartialité et l’absence de conflit d’intérêts,
- fournir une liste du personnel qualifié et une estimation de ses coûts.
L’agrément est délivré pour une durée de cinq ans.
Les contrôles devront s’appuyer sur des référentiels approuvés par le ministère de l’Énergie et mis en ligne sur la page officielle consacrée au biogaz : Biogaz | Ministères Aménagement du territoire Transition écologique
À ce jour, ces référentiels ne sont pas encore disponibles en ligne, mais ils seront indispensables pour préciser point par point ce que les organismes devront vérifier.
Ce qu’il faut retenir
Avec cet arrêté, la filière biométhane franchit une nouvelle étape dans sa structuration. Les contrôles deviennent un passage obligé pour toutes les installations, qu’elles soient soutenues par un contrat d’achat ou qu’elles valorisent leur production via les CPB.
Au-delà de la contrainte réglementaire, ces contrôles visent à renforcer la crédibilité du biométhane : fiabilité des volumes injectés, traçabilité des intrants et transparence des soutiens publics comme des certificats. Pour les producteurs, l’enjeu est désormais d’anticiper leur calendrier de contrôle et de préparer la documentation nécessaire, afin de sécuriser leurs revenus et leurs perspectives de valorisation.
En pratique, 2026 marquera le véritable coup d’envoi de ce dispositif, avec les premiers contrôles périodiques. Une échéance que l’ensemble des acteurs de la filière doit dès à présent avoir en tête.