Après le sucre et l’éthanol, le biogaz : la deuxième vie économique de la betterave sucrière passe par sa pulpe

Au Danemark, la valorisation énergétique des coproduits agricoles franchit un nouveau cap.
La pulpe de betterave, longtemps considérée comme un simple aliment pour le bétail, voit désormais son prix indexé sur celui du gaz naturel.
Un signal fort : la transition énergétique commence à redessiner la hiérarchie économique des sous-produits agricoles.

La pulpe de betterave, nouvelle matière stratégique pour le biogaz

Traditionnellement, la pulpe issue du processus d’extraction du sucre était presque exclusivement utilisée pour l’alimentation animale.
Appréciée pour sa richesse en fibres digestibles, elle permettait de valoriser localement un coproduit agricole de masse.

Mais avec le développement massif de la méthanisation au Danemark, cette pulpe a trouvé une nouvelle vocation : celle de produire du biogaz, injectable dans les réseaux ou valorisable en électricité et chaleur.
Sa haute teneur en matière organique et son potentiel méthanogène élevé en font une ressource énergétique efficace.

Un moteur local : la conversion énergétique des sucreries

Cette dynamique est aussi portée par la conversion énergétique des sucreries danoises, qui remplacent progressivement leur consommation de fioul par du biogaz pour répondre aux objectifs climatiques nationaux.
Face à cette évolution, les planteurs de betteraves ont négocié l’indexation du prix de la pulpe sur celui du gaz naturel, reconnaissant ainsi sa valeur énergétique réelle et sa place dans la transition des filières industrielles.

Un changement de paradigme économique

Ce mécanisme d’indexation sur le gaz traduit une évolution profonde :
La valeur énergétique d’un sous-produit agricole devient un critère de marché à part entière, au même titre que sa valeur alimentaire.

Cette évolution invite à repenser les modèles économiques traditionnels :

  • Comment répartir les flux entre alimentation animale, énergie, et autres usages ?
  • Comment fixer des prix justes, sans fragiliser les filières d’élevage dépendantes de ces coproduits ?
  • Comment intégrer les critères de durabilité et d’indépendance énergétique dans les stratégies agricoles ?

Le Danemark, en faisant ce choix, anticipe une tension croissante entre différents usages des biomasses agricoles, à l’heure où l’énergie renouvelable devient un levier majeur de souveraineté.

D’autres sous-produits betteraviers à valoriser

Au-delà de la pulpe, plusieurs autres résidus issus de la transformation de la betterave mériteraient une attention accrue pour leur valorisation énergétique :

  • Les veinasses : eaux de lavage des betteraves, riches en matière organique facilement méthanisable,
  • Les écumes : sous-produits du traitement des jus sucrés, également sources potentielles de biogaz après séparation des carbonates,
  • Les déchets de détartrage : matières riches en carbone issues de la maintenance des installations sucrières.

Actuellement, ces flux restent souvent peu valorisés, voire traités comme des déchets classiques.
Pourtant, leur potentiel méthanogène, combiné à des techniques de prétraitement adaptées, pourrait renforcer la circularité énergétique de toute la filière betteravière.

Une opportunité de réflexion pour la France

La France valorise déjà une partie de ses coproduits betteraviers en méthanisation, que ce soit sous forme de pulpe, de veinasses ou d’autres résidus industriels.
Cependant, l’exemple danois ouvre une piste de réflexion : reconnaître et intégrer de manière plus systématique la valeur énergétique de ces flux, par exemple via des mécanismes contractuels liés au prix du gaz ou du biométhane.

Dans un contexte de transition énergétique, de volatilité des marchés agricoles et de besoin d’indépendance énergétique, une approche circulaire renforcée pourrait contribuer à consolider la place stratégique de la filière betteravière française, tout en multipliant les débouchés pour ses sous-produits.

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